L'invité de Pascal Vrebos
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C’est la personnalité préférée des francophones et elle est dans le top 100 des femmes puissantes dans le monde. Mon invitée est Sophie Wilmès : Vice-Première ministre et ministre MR des affaires étrangères.
Vous l’avez dit, ça va mieux … Le virus ne vous a pourtant pas épargné. Une étude est apparue en disant que trois quart des personnes hospitalisées avaient des symptômes encore six mois après.
C’est vrai.
Ce n’est plus votre cas ? Vous êtes complètement rétablie ?
Je suis partie du principe que je ne parlerai pas de mon cas particulier. Par contre je peux m’appuyer sur mon expérience personnelle pour vous dire qu’effectivement il y a une différence entre le fait d’être s « guérie », et le fait d’être capable de reprendre une activité complète. Parce que l’ on peut souffrir d’éventuelles séquelles qui peuvent être handicapantes.
Et je pense que les gouvernements et la société dans son ensemble doivent tenir compte de cela. Parce que retourner au travail peut aussi aider à passer à autre chose et passer le cap de la maladie. Mais si ça ne se fait pas dans des conditions qui sont suffisamment bonnes, vous pouvez, à mon avis, prendre le risque de trainer ses séquelles et ses difficultés trop longtemps.
Votre médecin ne trouve pas que votre métier de ministre et Vice-Première n’est pas idéal quand on est en convalescence après une maladie sérieuse. Il ne vous dit pas de faire attention ?
Effectivement ils me disent de faire attention.
Vous ne les écoutez pas ?
Je les écoute parce que ce sont des professionnelles et ils ont à cœur ma santé, mais c’est vrai aussi que je fais la part des choses. J’ai des responsabilités qui sont très importantes et au moment où j’ai repris le travail, je me disais aussi que cela faisait partie de mes équilibres de vie et que ça m’aiderait probablement à passer à autre chose.
Un tout petit mot sur le passé, avant de parler de l’avenir. Vous auriez eu un Frank Vandenbroucke au lieu d’une Maggie De Block. Est-ce que votre gestion n’aurait pas été différente ?
Par définition, parce qu’il s’agit de deux personnalités différentes, qui ont des approches différentes. Ce que je ne veux pas faire ce sont des comparaisons stériles et attribuer des points.
Non, je vous ne demande pas ça.
Je sais que ce n’est pas ce que vous me demandez, mais je sais aussi que, souvent, on a un peu tendance à opposer les gens, à opposer les uns aux autres. Donc oui, ça serait diffèrent par définition.
Mais par exemple, vous ne vous sentez pas un peu responsable de cette deuxième vague à cause de la communication du déconfinement. Peut-être que avec un Vandenbroucke ça ne se serait pas passé comme ça ?
Dans votre question il y a un énorme raccourci . J’ai fait encore récemment un interview avec Marius Gilbert, qui expliquait que le CNS du 23 septembre n’est pas responsable de la deuxième vague. On constate que le 23 septembre, effectivement, nous avons suivi les propositions des experts, ce qu’on a toujours fait depuis le début, on nous l’a suffisamment reproché.
Ce n’est qu’un mois et une semaine plus tard qu’on a effectivement acté un lockdown. Donc entre temps, on a essayé - le nouveau gouvernement - de serrer petit-à-petit la vis pour voir comment on pouvait contrôler cette deuxième vague et on n’y est pas parvenu. Je pense qu’il ne faut pas pointer du doigt les uns et les autres. Il s’agit d’un virus qui est certes mieux connu qu’il y a neuf mois, mais qui suscite encore plein d’interrogations.
La contamination elle semble reprendre avec ce virus qui aurait muté en Angleterre. Emmanuel André a dit hier qu’il faut maintenir la pression au moins jusqu’à la sortie de l’été.
Ça dépend de quelle pression on parle. On voit qu’on a appris énormément de choses sur la propagation du virus. Première chose qu’il faut garder à l’esprit, c’est que peu importe les expressions, ce qu’importe d’abord, c’est la santé de nos concitoyens. Mais c’est vrai aussi, qu’il a des équilibres de vie qui doivent pouvoir être conservés. La santé mentale des uns et des autres est aussi fondamentale. On voit que les dispositifs sont de plus en plus lourds à supporter pour la population et faire semblant que ça n’existe pas ou ne pas vouloir l’adresser ça serait, je pense, une erreur.
Je pense que c’est plus raisonnable d’avancer au fur et à mesure. De continuer à voir et à évaluer la situation épidémiologique. Et quand c’est possible, pouvoir donner un peu d’assouplissement. Quand c’est possible, et pas avant que ça soit possible. Pour aussi montrer à la population qu’elle fait bien de respecter les règles, parce qu’ elle l’a fait cet hiver.
Les vaccins, ne vont va pas assez vite ?
Les vaccins n’iront jamais assez vite. Parce que l’on espère tous récupérer nos libertés et je dois dire que, quelque part, [parler de lenteur] c’est un mauvais procès selon moi. Pourquoi ? Je me souviens au mois de mars quand la crise a débuté, nous n’avions pas seulement aucune idée à propos du virus, on était aussi dans une situation de grande angoisse. Mais en plus, à l’époque, on pensait que l’on aurait un vaccin pour 2022. Ici on profite de l’avancée de la science et donc oui ça doit se passer le plus rapidement possible dans les meilleures conditions, mais il faut aussi laisser le temps aux choses.
Le QCM : Qui a dit : « La démocratie ne peut pas être exportée vers un autre endroit. Cela doit être un produit du développement interne dans une société. » Le président chinois Xi Jinping, Vladimir Poutine ou Erdogan, le président turc ?
Vous me posez une colle mais je, dirais Poutine.
Bravo, vous avez gagné. Justement, la démocratie, c’est le système qui est le pire, à l’exclusion des autres, comme disait Churchill ?
Je pense que la démocratie est le seule système qui convient à nos aspirations et à la liberté. La démocratie est un système qui permet aux individues de prendre leur destin en main, parce qu’ ils vont choisir celles et ceux qui vont prendre les décisions sur base d’un programme. Tout ça doit se faire de manière transparente. Ce qu’on a vu ces derniers temps, c’est que la démocratie est fragile. Elle est très fragile. C’est vrai que on a appris en 2020 que tout ce qu’on considérait comme acquis, comme par exemple être en bonne santé, se déplacer librement mais aussi les processus démocratiques, peuvent être mis à mal. On l’a encore vu récemment aux États-Unis.
Vous avez rencontré Donald Trump à l’Otan ? C’était un homme intelligent ou complément clownesque ?
Oui, je l’ai rencontré. J’ai eu une discussion avec lui assez sérieuse sur l’engagement de la Belgique au niveau de l’Otan en terme de dépenses, vous vous souviendriez du niveau de deux pourcent à respecter.
Il connaissait les chiffres ?
Il connaissait les chiffres. Il est très attaché aux deux pourcent et je pense que c’est une erreur d’appréciation, mais on pourrait avoir ce débat politique un autre moment, parce que quand un pays comme les États-Unis dépensent deux pourcent de produit intérieur brut pour du matériel militaire qu’il produit lui-même, ce n’est pas la même chose.
Et deuxièmement, vous pouvez intervenir de manière positive dans l’Otan au niveau des opérations.
Il ne vous a pas paru imprévisible, narcissique? Comme on dit qu’il est.
Il y a deux choses. Il y a d’une part son comportement au niveau politique. Qui est effectivement extrêmement imprévisible et qui manquait de sérénité. Et par ailleurs il y a le comportement personnel, une discussion personnelle qui a eu lieu et ou j’ai eu affaire à un homme charmant, intelligent et, même, avec le sens de l’humour.
Maintenant on a vraiment l’impression qu’il est aux abois. Qu’il est vraiment imprévisible. Est-ce que vous craignez encore aujourd’hui, alors qu’il lui reste encore quelques jours, qu’il a toujours la possibilité de pousser sur le bouton nucléaire ?
C’est une faculté qu’il a. Je ne peux pas croire que ont soit dans ce type de risque. Mais je vois que les Démocrates sont en train de se mettre en marche pour procéder dès lundi à une procédure d’« impeachment », de destitution alors que la passation de pouvoir se déroule dans dix jours. Là il y a peut-être des enseignements à tirer.
On a vu que Twitter et d’autres réseaux sociaux ont fermé le compte du Président des États-Unis, on a même supprimé des messages sur ‘potus’, le compte officiel. Mais dites-moi : aujourd’hui qui a le vrai pouvoir ? Ce sont les GAFA ? Est-ce que s’est inquiétant ou pas ?
Il y a une double question. La question de la responsabilité et du pouvoir. L’un va avec l’autre. D’une part il faut admettre, et encourager, le fait que lorsqu’ on se rend compte que certains discours ont tendance à initier la violence, vous devez pouvoir intervenir. au niveau de la Commission européenne, on essaie de cadrer la gestion de contenu parce qu’ il doit y avoir une responsabilité des plateformes. En face de cela, vous avez le point que vous mettez sur la table. C’est-à-dire, c’est mêmes plateformes qui sont devenues totalement monopolistiques, surtout et aussi dans la parole politique, et qui vont décider de fermer le robinet définitivement. En tant que politique quand vous êtes réduit en silence de cette manière-là, ça a un impact majeur.
Il faut réagir ?
Je pense qu’il faut en débattre. Il faut faire cela sereinement, mais on voit quand même que le pouvoir, les capacités, la responsabilité … et bien, tout cela a ses limites. Et le faudrait peut-être recadrer cela.
La Belgique : le podium. L’opposition. Bart De Wever, Peter Mertens, Maxime Prévot, François Desmet.
En trois, Bart De Wever. En deux, Maxime Prévot. En un, François Desmet. Et au tapis, Peter Mertens, PTB.
François Desmet en un ?
Oui, François Desmet est une personnalité politique - je sais qu’on a pas l’habitude de dire des gentilles choses sur nos adversaires politiques – qui est pondérée, qui fait la part des choses et qui a une approche politique qui correspond bien aux valeurs que je défends aussi.
Kristof Calvo a dit -suite à ce qui s’était passé aux États-Unis - : « le virus de la haine se trouve parmi nous ». C’est-à-dire parmi nous à la Chambre ?. Est-ce que vous sentez cette vague de haine qui a envahi notre pays ?
La première chose à faire, c’est être factuel. À la Chambre il y a des partis extrémistes qui ont été élus.
Vous pensez au Vlaams Belang ?
Le PTB est aussi un parti d’extrême-gauche.
Le N-VA ?
Ce n’est pas un parti d’extrême, il faut faire la part des choses. Chez ces partis d’extrêmes, il y a souvent la volonté d’aller exciter la moins belle partie de notre humanité, avec des discours qui sont souvent très à la limite. Je pense que quand on regarde ce qui s’est passé aux États-Unis, il faut pouvoir faire la balance et revenir vers nous et se dire : tiens est-ce que chez nous ça pourrait arriver ? Est-ce que chez nous aussi, il y a un risque ?
Est-ce que ça pourrait arriver ?
Je pense que tout est fragile et si on fait pas cette distinction fondamentale entre le point de vue politique, le débat qui doit avoir lieu et les ‘fake news’, on peut avoir effectivement un problème.
Le mea culpa. Sophie Wilmès, face à la gestion de la COVID, avez-vous aujourd’hui un mea culpa ?
Je n’en ai pas encore. Quand j’ai fait des erreurs pendant la crise, je pense que je les ai reconnues. Est-ce que c’étaient les seules erreurs ? Probablement pas. Mais pour faire cette analyse-là, il faut du recul et de la sérénité. Je pense que la sérénité, je l’ai. Le recul, probablement pas encore.
Un petit tour du monde, Ministre des affaires étrangères. Prenons Erdogan avec ses actions en Libye, à Chypre, en Grèce, cette provocation, cette volonté d’expansionnisme. Certains ont même parlé d’un Munich du peuple Kurdes. Est-ce que l’on est dans la lâcheté politique comme certains le sous-entendent ? On laisse faire Erdogan ?
Je ne pense vraiment pas. D’abord il faut mettre les choses dans leur contexte. La Turquie est un pays que fait partie de l’alliance de l’Otan, c’est un pays allié. C’est un pays qui a fait à l’époque mine de vouloir intégrer l’Europe. Là, on a quand même des questions que l’on peut se poser.
À chaque fois que des paroles sont exprimées, qui sont contraires à nos valeurs nous sommes audibles en ce qui concerne. Et quand il y a des actions qui sont posées, qui posent des problèmes soit aux états membres, soit à l’ordre du monde en général, nous prenons des sanctions. Et donc je pense pas qu’il ne faut pas confondre dialogue et sanctions, avec une espèce de souplesse qu’on aurait donné aux uns et aux autres d’agir librement.
Alors, la Hongrie et l’Europe. Viktor Orban, toujours fréquentable au milieu des valeurs européenne ou pas ?
Moi j’ai une difficulté fondamentale avec celles et ceux qui ont signé pour l’Europe et qui ne respectent pas ses valeurs. Faire partie du projet européen, ce n’est pas qu’une question de Marché Unique ou d’économie. C’est aussi s’inscrire librement mais fondamentalement dans nos valeurs européennes. Et ces valeurs ne sont pas à la carte.
Et ce n’est pas le cas ? La presse muselée, la corruption, …
Je suis bien d’accord avec vous. Ce n’est pas à la carte. Donc on doit impérativement continuer à adresser ces problèmes et être extrêmement vigilants parce que ce n’est pas le projet européen dans lequel je m’inscris.
Quand Charles Michel était à votre place et Didier Reynders, ministres des affaires étrangères, ils avaient parlé de Poutine, qu’il fallait aller le voir et d’ailleurs ils ont été le voir. Est-ce que c’est aussi votre intention ?
Je n’ai pas à priori l’intention d’aller voir Poutine, mais je comprends la démarche. La Russie est un acteur très important sur la scène internationale. Vous savez aussi qu’elle se situe aux portes de l’Europe. Nous avons décidé d’établir certaines limites au sein de l’Otan, avec tout un système de dissuasion, mais en parallèle à ce système de dissuasion militaire, je pense que le dialogue doit être absolument maintenu. Il n’y a que comme ça qu’on rétabli la paix dans le monde.
Un mot sur le professeur de la VUB, Djalali, qui est condamné à mort pour espionnage en Iran. Vous avez eu votre homologue au téléphone. Vous gardez l’espoir ?
Oui, je garde l’espoir. Il faut toujours garder espoir. Il ne faut pas être naïf non plus. J’ai eu une discussion avec mon homologue iranien, une discussion courtoise, polie, mais ferme sur le rappel de ce que sont nos fondamentaux. Nous continuerons de travailler dans cette direction.
La question qu’on n’ose pas poser, mais qu’on pose quand même. Madame la Ministre, il y a-t-il la main d’une personnalité, d’un dirigeant, d’un empereur que vous ne pourrez jamais serrer ? Ou bien la realpolitik avant tout ?
Je pense que la question ne se pose pas en termes de serrer la main ou pas. Je pense que la question se pose en termes : est-ce que vous refuserez de dialoguer avec qui que ce soit.
La réponse est non. Je ne refuserai jamais de dialoguer avec qui que ce soit.
Parce que pour faire passer même un message dur, même un message qui consiste à dire à quel point on est en désaccord. Pour cela il faut qu’il y ai un contact et une relation qui s’établisse.
Un peu de politique au MR. Il y a le fameux G11, les onze sages. Vous en faites partie. Vous managez votre président, où il se manage toujours tout seul ?
Il n’est pas de question de manager un président. Je pense qu’on a de nouveau essayer de tirer des conclusions un peu hâtives sur un processus qu’on voulait mettre en place. Qu’est- ce qu’on voulait faire en fait -et le président s’inscrit parfaitement dans cette démarche- ?On estimait que l’on n’est pas intelligent tout seul et l’on doit pouvoir faire rebondir la balle. On doit aller voir dans le parti quelles sont les différentes sensibilités et c’est ce qu’il fait.
Et il vous écoute maintenant, ou pas ?
Il prend en tout cas ses renseignements avant d’agir. Il y a un vrai échange sur ce qui se passe et c’est ça qui faut garder à l’esprit.
Le Bozar. Il y a la succession de l’actuel directeur, Paul Dujardin. Vous avez un candidat, Christian Longchamps. J’ai lu dans la presse que les Vice-Premiers n’étaient pas d’accord avec votre choix ? Pourquoi ? C’est Dujardin qui est soutenu politiquement ? C’est du marchandage ?
Je pense qu’il faut surtout éviter d’en faire une question de politique ou de personne. Monsieur Dujardin et Monsieur Longchamps sont candidats pour gérer le Bozar. Les différentes procédures doivent avoir lieu et se clôturer. S’agissant justement des qualités personnelles des uns et des autres, et surtout s’agissant des personnes, je ne vais pas rentrer dans une démarche qui consisterait à préférer l’un ou l’autre publiquement et en expliquant pourquoi ceci et pourquoi cela. Je pense effectivement que ça n’a rien à voir avec des questions politiques. On va devoir continuer sereinement à aborder ce problème.
Les cotes sur 10. L’accord actuel du Brexit
L’accord actuel du Brexit. Je dirai 8, pourquoi ? Parce que, justement, c’est tel qu’on le connait. On le connait pas encore parfaitement et peut être un 10 sur le fait qu’il existe.
La coiffure du Ducarme
Sa coiffure : 10 sur 10, parce qu’elle est détonante. Son appel…
C’est électoraliste, a dit le président Magnette.
Je pense que ça n’est pas respectueux de la légitimité qu’on peut avoir de prendre à cœur la destinée de ces hommes et ces femmes qui ont des projet des vies et qui ont le droit de savoir qu’on s’en préoccupe et qu’on essaie de voir ce qu’est possible, pas au détriment de la santé des uns et des autres, personne ne l’a dit mais c’est comme même fondamental.
Jan Jambon : des vaccins pour la Flandre uniquement
Je ne le coterai pas positivement, parce qu’on sait que on est dans une démarche européenne est c’est cela qui nous rend fort. Ça c’est une mauvaise cote, 3.
30 km à la région bruxelloise. C’est discuté pour le moment et d’application.
Pour le moment, 4. Parce qu’on voit bien que le travail d’analyse au départ n’a pas été fait. On aurait pu aborder les choses différemment.
Sophie Wilmès, le tweet que vous n’écrirez jamais… ?
J’y ai pensé en regardant l’émission précédente. Je pense que je n’écrirai jamais qu’il est acceptable de gouverner avec les extrêmes.
Sophie Wilmès, merci d’avoir été mon invitée.